Fin de vie : oui à l’urgence de la fraternité !

Fin de vie : oui à l’urgence de la fraternité !

Texte relayé par la revue Settimana news :  www.settimananews.it

Le 22 mars 2018, l’ensemble des évêques de France, réunis à lourdes en assemblée plénière de la conférence des évêques de France ont adopté un texte qui en appelle à une prise de conscience sur le risque de légaliser l’Euthanasie.

Un appel de plusieurs parlementaires dont l’initiative revient à un député du parti « la république en marche », (majorité du président Emmanuel Macron) a relancé le débat sur une législation possible de l’euthanasie.

En plein débat sur la bioéthique et le projet du gouvernement de légiférer sur la PMA : procréation médicalement assisté, voire d’ouvrir la possibilité de la GPA :  gestation pour Autrui, l’Eglise se trouve confrontée de multiples façons sur le caractère éthique de ces évolutions techniques et surtout de ces demandes. C’est le sens de la vie, de sa transmission et de sa fin qui sont touchés. Il s’agit bien pour l’Eglise de se situer face à un défi d’une évolution anthropologique.

Avant d’aborder dans les mois à venir, la question de la transmission de la vie, le groupe de travail en charge de ces questions a vu l’opportunité de rappeler des fondements de l’anthropologie chrétienne.

Le texte articule étroitement Euthanasie et demande de suicide assisté : avec un rappel biblique fort « Tu ne tueras point ». Et simultanément le texte lie cette citation à une seconde : « qu’as-tu fait de ton frère ? ». Car il s’agit bien d’intégrer ces demandes individualisées dans un processus social.

Il m’a été donné de recueillir les confidences d’un homme qui avait ainsi fait de manière légale et en milieu médical, le dernier geste d’injection pour un ami, qui lui avait confié en confiance cette tâche.
Nous étions en Suisse, tout était légal et sous surveillance médical. L’ami exprimait une ultime confiance à celui avec lequel le liait des liens d’amitiés depuis l’enfance. Des années plus tard cet homme restait noué par le remords d’avoir accompli ce geste ultime et « sécurisé ».

Demander à la société, et au corps médical, aux médecins, aux infirmiers et aux aides-soignants de réaliser ce geste de mort à la demande du futur mort, c’est rompre la fraternité et c’est à proprement parler briser l’interdit de donner la mort. On retrouve un identique sursaut de révolte de la conscience dans l’accomplissement de la peine de mort. (Il faut distinguer ce geste de celui du soldat en temps de conflit).

Le texte redit avec force l’attachement de l’Eglise aux « soins palliatifs » et insiste sur la nécessaire ouverture à tous de l’accès à ces soins. (Cet accès demeure très inégal et n’est pas encore possible ou proposable pour l’ensemble des patients en fin de vie et des familles qui les accompagnent). Pour avoir vécu cet accompagnement, je peux témoigner de l’ajustement du dialogue entre la famille dans sa diversité, et de l’équipe soignante dans sa pluralité. La dimension fraternelle et sociale est alors non seulement présente, mais refondée. Nous ne sommes plus dans l’ordre du permis et de l’interdit, mais nous sommes dans le temps de la confiance, du souci d’autrui, du respect de chacun, et de la convergence possible d’une vérité qui n’est pas un absolu intemporel, mais un chemin. Ce chemin d’existence inclut la possible mort de l’être aimé, comme un événement qui survient dont nul n’est l’auteur.

La gnose de l’intelligence artificielle rêve de détruire la mort ! Cette destruction serait le résultat de la toute-puissance de la technique, mais aussi celui de la toute-puissance de l’argent d’une économie digitale et dématérialisée. Cette tentation gnostique indique le désir d’une vie qui ne serait pas mortelle. Refuser la mort rejoint le désir de la maitriser par soi-même, faute de pouvoir la vaincre.

Début ou fin de la vie, une même tentation agite le débat éthique : celle de la maitrise totale du processus de la vie. Ce que la tradition chrétienne apporte au débat c’est que la Vie relève d’un don par autrui qui dépasse la simple intention d’autrui, et que la mort devrait relever d’un dé-saisissement qui n’a pas d’auteur direct.

Il est toujours possible d’identifier l’auteur de la mort, fut- ce par suicide, meurtre, ou accident involontaire. L’euthanasie en posant de fait la question d’une responsabilité sociale d’autorisation de la mort pose la question de cette identification. Le texte des évêques met en garde sur cette contradiction. L’identification fut elle diffuse et indirecte est légalement indiquée, mais alors la fraternité est blessée et le lien social – qu’on avait cherché pour légiférer – est contredit. Tel est le sens du point d’exclamation qui conclut le titre du texte.

 

Hugues Derycke

Prêtre de la Mission de France.

 

 

 

 

 

 

 

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