Ils croyaient tous que Jésus était le « Fils de Dieu ». Mais de quel Dieu ? Évidemment de celui dont ils avaient l’habitude : un Dieu tout-puissant, qui pouvait tout faire et qui savait tout. Cette manière de comprendre la divinité de Dieu déteignait sur l’humanité de Jésus. Ce n’était plus un homme comme les autres puisqu’il était Fils de Dieu. Si Dieu même était présent en lui, alors, lui aussi savait tout d’avance et pouvait tout faire.
Que s’est-il donc passé ?
Au lieu de changer leur regard sur Dieu en regardant l’humanité de Jésus, sa manière humaine de vivre, ils ont trafiqué son humanité pour garder leur manière traditionnelle de croire en Dieu. Et c’est ce que nous sommes tous tentés de faire et c’est ce que beaucoup de chrétiens ne cessent de faire et c’est ce que les auteurs des textes ont eu beaucoup de mal à ne pas faire !
Or c’est là le point central, le point décisif.
Il est inévitable que nous lisions ce qui est rapporté de Jésus à partir de notre idée reçue de Dieu, à partir de ce que nous « croyons » en connaître. Cela nous conduit à déformer la réalité de la vie humaine de Jésus, à trafiquer son humanité pour la faire coller avec ce que nous croyons savoir de Dieu. Ainsi, puisque Dieu « sait tout » et « peut tout », Jésus saurait tout d’avance et pourrait tout. Or les récits évangéliques, en particulier ceux de sa mort, montrent le contraire. Il faut donc essayer de comprendre Dieu à partir de l’homme Jésus et non l’inverse : c’est son humanité qui nous dit qui est Dieu car Dieu s’est livré en elle et à elle pour que nous le connaissions en vérité et que nous participions à sa divinité.
Ceci est au cœur de la foi des chrétiens en Dieu. C’est sans doute la seule chose, toujours actuelle, qu’ils ont à dire de Dieu.